mercredi 18 septembre 2013

A bout de souffle réalisé par Jean-Luc Godard (1960)







"C'est vraiment dégueulasse".
Telles sont les dernières paroles de Michel (Jean-Paul Belmondo), le héros mi voleur mi passionné. Des propos bien mystérieux car sujets à des interprétations très différentes. Ils évoquent l'emmerdant de la situation présente. Pourquoi ? Car son amour l'a dénoncé à la police ? Car la police lui a tiré dans le dos ? Parce qu'il meurt amoureux sans réciprocité ? Parce qu'il avait enfin terminé ses affaires à Paris et rêvait de partir pour Rome ? Très franchement, surement un peu tout ça à la fois.


Michel, c'est la liberté associée à la jeunesse, avec tout ce qu'elle comporte. Insolent, impulsif, nonchalant, dragueur, amoureux, voleur, irresponsable, vif, égocentrique, têtu, drôle, fin, lourd, superficiel, rêveur, incertain, mélancolique, colérique, heureux.

Difficile de décrire son caractère. Il est j'menfoutiste et pourtant il ne se fout finalement de rien. Tant qu'il est libre et qu'il aime ce qu'il est, qu'il aime ce qu'il renvoie à la gueule d'autrui, il sera magnifiquement heureux. Je suis certain d'avoir déjà connu son état d'esprit. Très dur à exprimer avec des mots, lui-même en est incapable. Il se laisse aller complétement à son intuition, à peine une idée fuse dans sa tête, aussitôt il décide de la mettre en œuvre. Il n'y a pas de passage par la case cerveau, c'est ainsi que la liberté totale peut s'obtenir. Il n'y a plus la pression sociale qui fait que, oui on peut faire cela, non cela nous rendrait ridicule, non ceci est interdit. Acceptez-moi comme je suis ! Sinon, merde. Je ne peux me décrire ou expliquer mon comportement mais j'aime vivre ainsi, sans souci, sans but, changeant d'aspiration comme change le temps. Ma seule finalité c'est de vivre comme je l'entends et ainsi, peu importe le regard des autres. A quoi bon, vivre pour les autres ? Si je subis les contraintes je serais moins moi-même, je devrais adopter un comportement ciblé et accepté. Une attitude dans la norme. Je suis ma propre norme ! Michel dit à un moment en décrivant une jeune femme quelque chose comme ça : "C'était une fille normale, c'est ce qui la rendait différente. C'est rare les filles normales.", nous rappelant ainsi le caractère relatif de la norme.

L'œuvre nous démontre de manière incroyable qu'il suffit de peu de moyen pour réaliser un très grand film. Des textes accrocheurs. De bons acteurs. Fin.
Nul besoin d'artifices en tout genre, pour faire ressentir. De beaux paysages américains, comme on en voit dans nombreux films à gros budget, des effets spéciaux surprenants, des femmes nues, des chansons hyper entraînantes, une qualité sonore et visuelle exceptionnelles. Tout ceci est vain et n'a jamais fait ni ne fera un bon film. Ce qui compte c'est l'émotion, reçu par des dialogues bien sentis ou un jeu d'acteur singulier à chaque personnalité et qui force le respect. Mais aussi, la globalité de l'œuvre. Où nous amène-t-on ? Je me laisse conduire même si ça n'a pas de sens. Parce que ! Cela à été audacieusement mené de telle sorte à ce que je me laisse faire.

Le film surprend par ses dialogues contradictoires, au lieu d'être perdu, car Michel change sans cesse d'opinion de Patricia Franchini (Jean Seberg), on en rit et l'on espère que la figure de style se présentera de nouveau devant nous, encore et encore. Patricia en fait de même pour Michel, est-elle amoureuse ? ou pas ? Ce qui est sûr, c'est que Jean et Belmondo sont d'un charisme scandaleux. Ils sont tous les deux très beaux. Patricia par la finesse de ses traits, son accent new yorkais et son côté détaché et réfléchi à la fois. Michel, par l'air qu’il se donne, les postures qu'il prend de bad boy attachant et sa répartie incroyable.

Quelle composition tout de même ! Vive et vivifiante, alchimique et haletante, excessive et excellente, absurde et absolue dans le temps comme dans l’esprit.

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